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28 novembre 2008

The Contemporary Indian "Other Masters" Collection

L'art est avant tout affaire de questions. Des sites rupestres à l'art des pyramides, de l'art sacré à l'art moderne et contemporain, l'histoire de l'art est le plus vaste ensemble de questions qui nous renseignent mieux sur l'histoire de l'humanité que toute "réponse" péremptoire. L'histoire de l'art est à la dimension de l'histoire de l'humanité : celle d'une suite de questions sans fin. De la qualité et de la diversité de ces questions dépendent la richesse et la pertinence de l’histoire de l’art. Dans cette confrontation, dialogue s'il en est, entre Richard Long et Jivya Soma Mashe il n'y a aucune réponse, seulement des questions. Un ensemble de questions aux origines les plus diverses.

Dialogue s'il en est ? Jivya Soma Mashe est issu de la tribu des Warli. Comme la plupart des membres de sa tribu, et malgré le succès et de nombreux voyages en Inde et à l'étranger, Jivya Soma Mashe parle encore et seulement le Warli, un dialecte qui ne s'écrit pas. Ayant eu une scolarité écourtée, j'ai appris l'anglais lorsque que j'habitais en Inde de 1996 à 1999. J'y ai appris l'anglais avec peu d'assiduité et une pratique limitée à mes voyages dans l'Inde profonde, celle des villages où la pratique de l'anglais est tout aussi répandue que réduite à un vocabulaire restreint.

Richard Long parle juste quelques mots de Français. Chaque jour, durant une semaine, nous avons visité, en compagnie de Denise Hooker, plusieurs villages, rencontrés de nombreux warli, hommes, femmes, enfants et vieillards avec lesquels nous avons discuté, échangé quelques mots (chacun dans nos langues respectives) comme l'on peut échanger des offrandes, des cadeaux. Des langues et des dialectes, des mots et des phrases semblables à des objets, sans significations précises, pour les uns comme pour les autres. Des mots et des phrases comme des objets intimes : présents, chaleureux, simples. Combien de fois ais-je eu, de retour de voyages, l’impression d’avoir dialogué avec Jivya Soma Mashe tant ces mots que nous échangions comme des objets étaient animés d’une vie propre ? Combien de fois ais-je parlé à Richard pensant qu'il me comprenait systématiquement ? Il en n’était rien. Seule son éducation et sa politesse me laissaient croire, par de chaleureux acquiescement, qu'il me comprenait invariablement. Au détour d'incompréhensions totales ce subterfuge n'était plus possible. Nous étions alors comme deux personnes parlant un dialecte différent.

Nous deux, trois avec Jivya Soma Mashe, et les Warli, étions comme les acteurs d'une pièce énigmatique. Esquissant une mimique à la Jacques Tati -dont l'admiration le pousse parfois à un certain mimétisme- et dans un français très british, Richard Long évoqua, à propos de nos curieux comportements linguistiques, "En attendant Godot" de Samuel Beckett.

Beckett, Tati, Long, Mashe, les Warli et leurs attitudes si spéciales, si retenues, discrètes et attentionnées, l'Inde : celle des "Adivasi" (nom donné par les Indiens pour désigner les populations tribales et signifiant littéralement "premiers habitants"), ce climat chaud et humide, ces paysages composés d'une multitude de petites parcelles de terrain (d'où l'origine du mot warli : "warla" qui signifie précisément "parcelle de terrain") où alternent terres brûlées par le soleil et rizières verdoyantes (grâce à une nappe phréatique généreusement irriguée par un vaste réseau de cours d'eau descendant des innombrables collines), ce relief révélant ostensiblement à travers une constellation de pierres (telle une pluie de météorites) son origine volcanique, les peintures de Jivya Soma Mashe et celles d'autres peintres Warli, les travaux in situ de Richard long, les nombreuses marches dans ces paysages, celle qui nous mena au sommet de la montagne sacrée (s'élevant face à la maison de Jivya Soma Mashe et dont le sommet ressemble formellement à un doigt pointé vers le ciel) ont été les éléments de décor de cette pièce sans dialogue, de cette histoire sans parole, qui s'est jouée en plein air dans le Thane District (Etat du Maharastra, Inde) du 29 janvier au 6 février 2003.

Hervé Perdriolle, 11 février 2003. Richard Long, work in progress, Warli aera, 2003

JIVYA SOMA MASHE
WARLI TRIBE
MAHARASHTRA

Jivya Soma Mashe belongs to the Warli tribe. Based in the Thane District, about 150 km north of Bombay, the Warli tribe numbers over 300,000 members. They have their own beliefs, life and customs which have nothing in common with Hinduism. The Warli speak an unwritten dialect mingling Sanskrit, Maharati and Gujarati words. The wall paintings are done only for special occasions such as weddings or harvests. The lack of regular artistic activity explains the very crude style of their paintings, which were the preserve of the womenfolk until the late 1960s. But in the 1970s this ritual art took a radical turn. A man, Jivya Soma Mashe started to paint, not for any special ritual, but on an everyday basis. His talent was soon noticed, first nationally then internationally, bringing unprecedented recognition, which prompted many other young men to follow suit. They started to paint regularly for commercial purposes and so developed skills that won the women¹s admiration. These days, few women paint, and they seem happy to leave the task to the men.


Jivya Soma Mashe, painting on paper, 1997, 13x18 cm

Jivya Soma Mashe, "Cauk", 1997, acrylic and cowdung on canvas, 115x146 cm.

Jivya Soma Mashe, born at the beginning of the 30s in Sauna Village, has an unusual background. He was abandoned by his family at an early age and refused to speak, communicating only by drawing pictures in the dust. This strange attitude soon won him a special status within his community. The first government agents sent to preserve and protect Warli art were amazed by his artistic abilities.

Jivya Soma Mashe and Indira Gandhi

Hervé Perdriolle
(in Tribals Art magazine, September 2001)

Jivya Soma Mashe, acrylic and cow dung on canvas, detail.

jivya soma mashe gulf news


Copyright textes, photos et collection : Hervé Perdriolle 
http://contemporary-tribal-folk-arts-india.blogspot.com/

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